Monsieur Avakian, sa vie, son œuvre

Monsieur Avakian, bonjour. Pouvez-vous vous présenter succinctement?

Je suis Hagop Avakian, de la famille Avakian, connue dans les Tapis d’Orient. Ma famille est originaire de la ville d’Antep, en Arménie occidentale. Nous sommes dans les Tapis d’Orient. Mes grands-parents et, avant eux, mes arrières-grands-parents ont commencé le métier en 1870. J’ai la chance d’aimer mon métier. Grâce à eux, je suis attaché à notre métier familial.

Cela fait quatre générations?

Oui, je suis la quatrième génération. Mais, encore mieux que ça, mes enfants sont la cinquième génération. Cela a commencé dans la ville d’Antep jusqu’en 1896, et ensuite à Alep en Syrie. En 1927, ma famille est allé s’installer au Liban, à Beyrouth. C’est ainsi qu’a commencé le travail familial, au Moyen-Orient.

A Beyrouth, vous étiez assez connu? Vous étiez le principal marchand de tapis?

Non, il y en avait beaucoup. Mais nous, nous étions des spécialistes. Avec mes frères, nous avons commencé le métier très jeune. J’ai pris l’aiguille à l’âge de huit ans, et j’ai commencé à restaurer les tapis. Il faut connaître les secrets du métier. Je suis restaurateur de tapis. Je répare les tapis, et ensuite, impossible pour vous de retrouver l’endroit où la réparation a été faite. Cela, c’est la force du métier. Il ne s’agit pas uniquement de vendre la marchandise, de vendre les tapis, il faut connaître tous les secrets du métier. C’est pour cela que je ne suis pas que vendeur de tapis, je suis aussi restaurateur de tapis. Avec mon père, mon grand-père et mon arrière-grand-père, j’ai eu la chance d’apprendre ce métier vraiment en profondeur et de manière très sérieuse. C’est ma vie, plus que mon métier. J’aime mon métier, j’aime les tapis. C’est de l’Art avec une aiguille. C’est un Art avec beaucoup de patience. La couleur, le dessin, l’harmonie, etc… J’ai énormément de chance.

Toute la famille était dans le métier. Et notamment en Angleterre aussi, non?

Oui. Malheureusement, le monde change, les temps changent. Mon père avait cinq frères, et mon grand-père aussi avait plusieurs frères. Tout le monde était dans les tapis. Mais, mes frères et moi sommes les seuls à avoir continué. Mais depuis lors, eux aussi ont arrêté. Maintenant, je suis le seul de cette grande famille Avakian avec mes enfants à avoir continué. Les autres sont tous dans d’autres business. C’est dommage, mais quand même, je suis content que mes enfants continuent ce métier noble, ce métier d’Art.

Vous avez deux magasins à Genève en Suisse. Et vous aviez aussi un magasin à Londres à l’époque.

Oui, il y avait un magasin à Londres, qui a été fermé, car comme je l’ai dit, personne n’a continué le métier, si ce n’est moi. D’ailleurs, j’ai même ouvert une nouvelle succursale, consacrée aux tapis de grandes tailles, car nous sommes les spécialistes des grandes dimensions. Ici dans ce magasin, je n’avais pas assez de places pour exposer toutes les pièces. On a donc séparé les pièces du Showroom et du magasin principal.

Depuis combien d’années êtes-vous à Genève?

Depuis 1976. Cela fait 48 ans. C’était hier!

Comment cela s’est passé au début, lorsque vous êtes arrivé en Suisse? Vous avez ouvert tout de suite le magasin?

Ah non! Je suis arrivé en Suisse, et le lendemain, j’ai direct commencé à travailler. Je ne parlais pas un seul mot de français. Je ne connaissais personne en Suisse. Mais comme j’avais « un métier dans la main »… Mon père m’avait dit, quand j’étais petit, à l’âge de 10 ans: « Quand tu as un métier dans la main, tu peux travailler et jamais mourir de faim… tu travailles! ». Et c’est vrai, c’est arrivé. Après avoir tout perdu au Liban à cause de la guerre civile, toute la famille s’est dispersée. Pour ma part, je suis arrivé en Suisse. Mais c’est une longue histoire ça, la manière dont je suis arrivé. Mais ce que je peux dire, c’est que je suis arrivé le soir, et le lendemain, je me suis fait engagé pour travailler dans les tapis. C’était au sein de la Maison König à Lausanne. J’y ai travaillé un an. Et comme je suis indépendant de nature, j’ai donc ouvert ensuite mon propre magasin. Et grâce à Dieu, ça va très bien!

Je vous ai déjà entendu dire: «  Si je ne vends pas ce tapis, je suis heureux. Si je vends ce tapis, je suis content. »…

C’est juste! Certains tapis, si je les vends, je suis content. Et si je ne les vends pas, je suis heureux! Car il y a certaines pièces dont il est difficile de se séparer, car j’avoue que je les aime énormément! Mais il y a aussi des pièces très rares, qui une fois vendues, seront absolument impossibles à remplacer. Impossible d’en trouver un deuxième exemplaire. Ce sont des pièces uniques. Et cela, même en ce qui concerne des tapis de petites dimensions, il y a de jolies choses. Même sur un tapis d’une valeur de 100 francs, on trouve toujours quelque chose de vraiment joli, de magnifique. C’est super! Il faut savoir que tout est noué à la main. Ils ont mis leur âme dedans. Ils ont mis leur savoir-faire. Ils ont mis leur regard. C’est un travail très minutieux de faire le noeud et les dessins. C’est un travail très conséquent. C’est pourquoi il faut savoir l’apprécier à sa juste valeur. C’est ce qui me fait penser qu’il n’y a pas de tapis « moches » pour moi! Je le redis, ils ont mis leur âme dans le travail qu’ils ont effectué. Là, je parle des Tapis d’Orient faits main, je ne parle pas des tapis mécaniques!

Vous avez des tapis mécaniques?

Non! Jamais de la vie! Cela n’existe pas chez nous. Dans la famille Avakian, il n’y a pas ce genre de choses.

C’est quoi la différence entre un tapis machine, et un Tapis d’Orient noué à la main? Comment voit-on la différence?

C’est à vous de voir la différence. Les autres sont des choses faites à la machine, c’est de l’acrylique. Et ce n’est pas bon pour la santé d’avoir des choses comme ça à la maison. Alors, que nos tapis, c’est de la laine pure. Cette laine provient directement de l’animal, et elle n’est pas traitée. C’est lavé… La teinte est faite naturellement. C’est de la laine naturelle. Certaines personnes prétendent qu’il y aurait de la poussière. C’est faux! Au contraire, c’est bon pour la santé! Il n’y a vraiment aucun danger avec les vrais Tapis d’Orient.

Il est où votre magasin?

Notre magasin est ici, là où je me trouve actuellement, dans le centre-ville de Genève, à 100 mètres de la Gare, au 18 de la Rue des Alpes. C’est d’ailleurs pas très loin du Jet-d’Eau également. On est là depuis des décennies!

On peut entrer sans problèmes? C’est ouvert à tous?

Avec grand plaisir! Les clients entrent ici. J’ai beaucoup d’amis… Je ne traite pas les gens comme des clients, mais comme des amis.

Un site internet sur lequel on peut retrouver les coordonnées?

Oui, il y a plusieurs moyens de nous contacter. Notre email info@avakian.ch et notre site internet https://www.avakian.ch ou alors, nos comptes AVAKIAN TAPIS D’ORIENT sur Facebook et Instagram.

Monsieur Avakian, merci beaucoup!

Merci à vous! Merci beaucoup! J’espère que cela vous a fait plaisir de lire cette interview! Je tenais à rajouter que dans les prochains épisodes de notre série, je vous expliquerai comment faire bien traiter son tapis, comment bien nettoyer son tapis, et aussi comment faire pour bien utiliser son tapis. J’ai encore beaucoup de choses à expliquer! Certains personnes ont chez eux des pièces uniques, des pièces de musée, et cela sans même être au courant. C’est la raison pour laquelle il est important de connaître la valeur des tapis que l’on a chez soi.

Il y a donc encore de prochains épisode à venir?

Oui! Beaucoup!

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